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#STOP ERDOĞAN

Depuis plusieurs années, la Turquie est engagée dans un terrible engrenage de violence que la tentative de coup d’Etat du 15 au 16 juillet 2016 a exacerbé.

L’AKP (islamo-conservateur) porte un projet civilisationnel qu’il entend imposer à l’ensemble de la société. Il s’agit d’enterrer le statu quo kémaliste avec son « laïcisme », sur la base du nationalisme, en réhabilitant le passé ottoman autour d’une synthèse qui exalte tout autant le néolibéralisme, la turcité et l’islam afin de redevenir le centre du monde arabo-musulman, voire une puissance mondiale. L’entourage de R.T. Erdoğan entretient depuis quelques années la fiction selon laquelle la Turquie serait jalousée pour sa gloire passée et que la Première Guerre mondiale n’aurait pas eu d’autre objectif que de détruire les legs ottomans. Dans la perspective d’un retour de la Turquie sur la scène internationale, le pouvoir se restructure autour de positions guerrières à l’intérieur et à l’extérieur du pays.

Pour cela, il a entrepris une réorganisation de la société en interférant dans la vie privée des citoyens, en imposant une domination sur les corps et en multipliant les injonctions moralisatrices sur les modes de vie, dont les femmes sont les premières victimes. Il entend remodeler les institutions afin de mettre en place un système présidentiel sans contre-pouvoir, ni mécanisme de contrôle et identifiant « l’homme providentiel » à la Nation. Progressivement, R.T. Erdoğan a vidé les institutions de leur sens et a dé institutionnalisé l’État en se transférant toutes les légitimités. Il n’a pas hésité à faire explicitement référence au nazisme comme source d’inspiration.

Cette politique suscite une extrême polarisation de la société et une forte opposition. Elle s’est exprimée lors des événements de Gezi mais surtout à l’occasion des élections législatives de juin 2015. A cette occasion R.T. Erdoğan a subi un revers sérieux. Avec 13 % des suffrages, le HDP, formation progressiste qui porte toute la diversité de la Turquie, a fait perdre la majorité absolue à l’AKP et a empêché la réforme de la Constitution. Pour gagner les élections qu’il avait perdues, R.T. Erdoğan a donc convoqué un nouveau scrutin et a plongé son pays dans le chaos en écrasant toutes les voix discordantes. Les médias ont été mis au pas avec la fermeture de journaux, de TV et le blocage des réseaux sociaux. Les arrestations pleuvent contre les journalistes et notamment Can Dündar, les intellectuels, les écrivains comme Asli Erdoğan, les élus kurdes ou les syndicalistes… Les appels à la violence se multiplient pour dénoncer les « traîtres » du HDP assimilés à des terroristes. Les atteintes aux libertés prolifèrent, les attentats contre les Kurdes se banalisent, tandis que les assassinats ciblés s’intensifient, comme celui du bâtonnier de Diyarbakir, Tahir Elçi. La société est entrée dans une dynamique de désintégration, de fragmentation et de radicalisation, dans laquelle les marges de manœuvre de l’opposition se restreignent.

R.T Erdoğan entend également faire payer aux Kurdes et à S. Demirtaş sa défaite en déclenchant une guerre civile au Kurdistan. De vastes opérations militaires sont lancées contre le PKK et des dizaines de villes. Elles sèment la mort, l’exode et la destruction comme à Cizré. Des crimes contre l’Humanité s’y produisent. L’immunité parlementaire des députés du HDP a été levée. Cette violence s’exerce contre le leader A. Öcalan, à l’isolement dans la prison d’Imrali, qui vient de réitérer ses propositions de pourparlers de paix.

En soutenant les djihadistes de l’État islamique dans sa volonté de détruire le Rojava (Kurdistan syrien), R.T. Erdoğan est parvenu aussi à importer la violence sur le territoire de son pays. Pour sortir de son isolement et s’extraire de la suspicion internationale dont elle fait l’objet, la Turquie a intégré la coalition internationale avec l’objectif de s’en prendre militairement au PKK et aux Kurdes de Syrie. L’invasion du Rojava, au mépris des règles internationales, vise à endiguer la progression kurde, à entraver l’unification des trois cantons et la constitution d’un espace kurde autonome. R.T. Erdoğan n’a-t-il pas proclamé il y a quelques mois que le Kurdistan de Syrie était une affaire intérieure de la Turquie !

La tentative de coup d’Etat militaire de juillet s’est donc produite dans ce contexte et tous les démocrates se réjouissent de son échec. Mais dans ce sillage, R.T. Erdoğan a organisé un contre coup d’Etat civil pour accélérer l’avènement de son projet politique. Avec la mise en place de l’état d’urgence, il dispose de tous les pouvoirs. Des purges gigantesques (60 000 à 70 000 personnes) frappent l’armée, la justice, l’éducation, les médias… sur la base de listes préétablies parmi les gülenistes mais surtout parmi les forces progressistes et kurdes. Plus de 15 000 arrestations ont eu lieu. La torture dans les prisons devient à nouveau la règle. Ces éliminations ne visent pas à rétablir l’État de droit mais surtout à saper les fondements des institutions, à museler l’opposition et à la réduire au silence. Pour accélérer ce processus, R.T. Erdoğan viole ouvertement la volonté populaire en destituant des conseils municipaux dans les villes kurdes, régulièrement élus, pour les substituer par des membres de l’AKP. Cette violence vise à frapper les imaginations et à instaurer la peur. Des purges d’une moindre ampleur s’étaient déjà produites en 2008 et 2013.

Combien de temps la France et l’Union européenne vont-elles encore soutenir un tel régime qui se livre à un chantage sur les migrants, viole les droits humains et massacre les Kurdes ? Quelle indignité ! Quelle lâcheté ! Le prix Nobel de Littérature, Orhan Pamuk, est sorti de sa réserve pour exprimer ses craintes de l’avènement d’un « régime de terreur en Turquie ». Une commission d’enquête de l’ONU vient de rendre un rapport accablant sur les exactions commises par l’armée turque au Kurdistan. Les communistes sont aux côtés de tous les démocrates de Turquie et pleinement solidaires des Kurdes qui paient à nouveau un lourd tribut. Ils appellent à la libération immédiate d’A. Öcalan et à la sortie du PKK de la liste des organisations terroristes. Il n’y a pas d’autres issues que la reprise des négociations de paix et une démocratisation en profondeur de la Turquie, comme l’appelle de ses vœux S. Demirtaş.

Pascal Torre
membre de la commission des relations internationales du PCF

 

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Une campagne nationale : STOP ERDOĞAN

L’association France-Kurdistan a lancé, à l’occasion de la Fête de L’Humanité, une campagne nationale intitulée « Stop Erdoğan ». Pour sa présidente, Sylvie Jan, il s’agit d’abord d’informer nos concitoyens sur la situation en Turquie mais aussi au Rojava. Elle entend pour cela, dans les semaines à venir, multiplier les débats et les rencontres dans toute la France afin de sensibiliser et d’interpeller les élus et le gouvernement sur les graves atteintes aux droits humains qui se produisent dans la région. La légitimité que la France et l’Union européenne confèrent aujourd’hui à la dictature de R.T. Erdoğan doit cesser immédiatement. Ces diplomaties, à contre-courant des exigences de paix, devraient s’attacher à soutenir les Kurdes qui combattent l’obscurantisme des djihadistes et qui promeuvent des orientations émancipatrices, progressistes et pacifistes.

Fidèle aux nombreuses initiatives de solidarité qu’elle a déjà conduites, l’association France-Kurdistan dénonce avec force la levée de l’immunité parlementaire des députés du HDP qui risquent plusieurs années de prison. Elle envisage pour cela de  proposer leur parrainage afin de bâtir autour d’eux la protection qui s’impose.

Forte de son expérience et de ses réseaux, elle sera au premier rang pour faire entendre l’exigence de vérité et de justice lors de la tenue en décembre 2016 du procès d’Ömer Güney, l’assassin présumé des trois militantes kurdes à Paris.

Aux côtés d’autres organisations et associations, le Parti communiste français se mobilise pour assurer le succès de cette campagne qui répond aux attentes de tous ceux qui aujourd’hui sont ulcérés par la politique d’Ankara et de ceux qui la confortent.

Pascal Torre
membre de la commission des relations internationales du PCF

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#STOP ERDOĞAN

le 23 September 2016

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