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Les trois défis de Rohani

L’accord sur le nucléaire, qui a permis de lever les sanctions internationales à l’égard de l’Iran, peut ouvrir une nouvelle page des rapports entre ce pays et ses voisins occidentaux.

La visite en France du Président Rohani, qui fait suite à celle en Italie, avait pour objectif de nouer des accords, permettant à l’Iran de sortir du marasme économique et financier dans lequel était plongé le pays depuis une dizaine d’années. C’est le premier chantier auquel s’était engagé Rohani, qui lui a permis d’assurer son élection par un peuple iranien épuisé des restrictions imposées par le blocus. Aujourd’hui, malgré un prix du pétrole qui a chuté de 100 à 20 dollars, l’Iran garde des atouts énergétiques dont il va continuer à se servir pour assurer son développement et l’amélioration des conditions de vie des habitants. C’est ce qu’attendent les 80 millions d’Iraniens, dont une majorité de jeunes de moins de 30 ans frappés à 40% par le chômage.

Les dizaines d’accords ou de promesses, signés en France, sont de bon augure pour les deux pays, notamment dans l’aéronautique. Mais les questions économiques ne sont pas le seul défi auquel le Président Rohani est confronté. A ses yeux, la question de la sécurité est majeure. La République islamique d’Iran, puissance chiite, se considère être la cible des pays occidentaux et de leurs alliés dans le Golfe comme l’Arabie saoudite, rivale régionale, et qui plus est sunnite. L’histoire récente ne lui donne pas complètement tort ; une guerre de huit ans dans les années 80 lui est imposée par Saddam Hussein, soutenu par les Occidentaux, des menaces répétées d’Israël, et enfin l’Iran considère que l’Arabie saoudite, via les groupes djihadistes armés, veut installer en Syrie et en Irak des régimes qui lui seraient hostiles. Son encerclement serait alors complet, du fait d’une Afghanistan, tombée aux mains des talibans. C’est ce à quoi l’Iran cherche à échapper en s’engageant militairement en Irak et en Syrie pour le maintien des régimes actuels, qui lui sont proches.

Troisième chantier, celui des libertés et du respect des droits humains. Le régime iranien poursuit une politique répressive contre toute opposition politique et s’attache à faire taire toute critique à son égard. L’usage répété de la peine de mort, les emprisonnements sans jugement, les poursuites contre les syndicalistes, les journalistes, les avocats et les militantes des droits des femmes, sont à juste titre condamnés unanimement. Au sein même des partisans du régime, la bataille est féroce, comme en témoigne le rejet des candidatures pro-Rohani pour les prochaines législatives. Parions qu’une amélioration des conditions de vie et qu’une politique de détente dans la région permettront d’alléger les mesures répressives actuelles.

Pour la France, en tout cas, il y a matière à prendre des initiatives qui permettent que cette région connaisse enfin la paix, le développement, en usant de ses relations avec des pays comme l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie, afin qu’ils renouent des rapports avec l’Iran, en faveur d’une politique de détente et de coopération. Tout le monde en serait gagnant, et les peuples en premier.

Patrick Margaté
Relations internationales du PCF
article paru dans Communistes du 3 février 2016